Poussière rouge de Jackie Kay : à la recherche des parents perdus
Jackie Kay a eu un destin exceptionnel. Elle est née en 1961 à Edimbourg d’une mère écossaise et d’un père nigérian, puis a été adoptée par des parents formidables, membres fervents du Parti Communiste à Glasgow. Enceinte à 26 ans, elle s’est mise à la recherche de ses parents biologiques, parce que ça la travaillait sérieusement.
C’est cette quête épique, qui n’a pas été sans embûches, qu’elle raconte sans sentimentalisme et avec douceur dans ce roman complètement autobiographique, traduit en français en 2013. Le récit de ses rencontres avec ses géniteurs, non linéaire, est entrecoupé de bribes de souvenirs d’enfant, d’adolescente et de jeune adulte, qui a emmagasiné les questionnements sur ses racines.
De l’Écosse au Nigeria, de l’Afrique qu’elle s’imagine à celle dont elle foule le sol, de la découverte de sa mère biologique, une ancienne infirmière atteinte d’Alzheimer à celle de son père, un universitaire illuminé qui dédie sa vie à l’étude des arbres et à l’adoration de Dieu, Jackie Kay ira jusqu’au bout de sa quête identitaire.
Métisse lesbienne au coeur d’une Écosse de ploucs dans les années 80, poète et militante féministe (un ovni quoi, la meuf), elle a connu le racisme, l’homophobie, la solitude et ce sentiment qu’il lui manquait une partie de son histoire. Mais elle a été très heureuse aussi, grâce à ses parents et à son chemin de vie, et c’est pour ça que son roman respire l’amour et la positivité.
C’est un grave accident de mobylette qui à 17 ans, l’emmène à écrire sur son lit d’hôpital. Grâce à sa prof d’anglais, ses poèmes atterrissent entre les mains de l’écrivain-peintre Alasdair Gray. Celui-ci lui dit “THE” phrase qu’elle retiendra toute sa vie : “Ma foi, il n’y a pour moi aucun doute là-dessus, pour moi vous êtes un écrivain”. Au cours de son existence trépidante de femme de lettres afro-écossaise à la recherche de ses origines, Jackie Kay est notamment devenue super pote avec la fameuse écrivaine nigériane Chimamanda Ngozi Adichie. Quand on est donc auteur et qu’on a eu une telle vie, il y a effectivement matière à livrer un récit intime hors du commun.
Un extrait pour la route (p.126-127, éditions Métailié) : “J’aime Aberdeen. Son nom réunit la Dee et le Don, les deux fleuves qui y coulent. J’aime la lumière qui vient de la mer du Nord, et la façon dont le granit étincelle et scintille véritablement. Cela donne à la pierre l’air d’être vivante, et à la ville une présence à la fois splendide et fantomatique. J’aime cette ville car je suis un peu romantique malgré moi : je suis venue y chercher l’histoire d’amour de mes parents biologiques ! Personne n’a envie d’être issu de la haine, de l’ennui, de la bêtise ou de l’ignorance. Je préfère croire que j’ai été conçue par amour. J’aime imaginer mon père noir follement épris de ma mère blanche”.
Découvrez un résume de l’éditeur ainsi qu’une chronique de blogueuse littéraire du roman Poussière Rouge.